Une croissance annuelle réelle de 2,5% est nécessaire
Pour le Conseil des EPF, il ne fait aucun doute qu’une croissance réelle de 2,5% par an est nécessaire pour que le Domaine des EPF soit en mesure, d’une part, d’accomplir ses multiples tâches au profit de l’économie et de la société suisses et, d’autre part, de fournir des solutions globales qui aideront notre pays à relever les défis à venir, tels que la transition énergétique, la numérisation ou la cybersécurité. Le projet de Message FRI ne prévoit cependant qu’une croissance nominale de 1,6% par an pour le Domaine des EPF, soit un taux inférieur à la moyenne de 2,0% figurant dans le Message FRI. Au vu des prévisions de renchérissement, on peut craindre une croissance réelle nulle, voire négative.
La prospérité et la réussite de la Suisse reposent sur l’excellence de notre système de formation ainsi que sur la solidité de notre pôle de recherche et d’innovation. Le Domaine des EPF joue un rôle central à cet égard. Toutefois, les ressources prévues dans le Message FRI 2025–2028 ne lui permettront que partiellement d’assumer sa fonction de moteur de l’innovation et de former la main-d’œuvre spécialisée dont la Suisse a cruellement besoin, notamment dans les secteurs de l’informatique et des sciences de l’ingénieur. Cela portera préjudice non seulement au Domaine des EPF, mais aussi à l’ensemble de l’économie et du secteur de l’innovation. La Suisse pourrait dès lors perdre la longueur d’avance qu’elle avait sur d’autres Etats. La forte croissance des effectifs étudiants nécessite elle aussi des investissements supplémentaires sous peine de compromettre la qualité élevée de la formation.
Renforcer le Domaine des EPF au lieu de l’affaiblir davantage
En février 2023, le Conseil fédéral a décidé de prendre des mesures d’assainissement pour le Budget 2024 et les années 2025 à 2028. Le Domaine des EPF est touché à plusieurs égards: tout d’abord par la non-budgétisation de la contribution obligatoire à Horizon Europe, puis par les coupes de plus de 2% et enfin par l’abandon de la compensation du renchérissement. La croissance nominale de 1,6% actuellement prévue dans le Message FRI ne fera que l’affaiblir davantage. Un financement fédéral suffisant et stable est crucial pour le Domaine des EPF étant donné qu’environ 90% de ses ressources proviennent directement ou indirectement de la Confédération.
La réduction des réserves est en cours avec une marge de manœuvre opérationnelle réduite pour le Domaine des EPF
Le Message FRI indique en p. 66: «Du fait de l’autonomie du domaine des EPF et de celle de ses institutions, le Conseil des EPF dispose pour ce faire1 d’une grande marge de manœuvre sur le plan opérationnel. Il y est aidé par les réserves financières du domaine des EPF, qui lui permettent d’amortir les effets d’une dotation inférieure aux montants prévus dans son plan stratégique.»
Les réserves permettent au Domaine des EPF d’investir dans de nouveaux champs de recherche et lui donnent la flexibilité financière dont il a besoin. Elles contribuent également à combler les déficits à court terme dus à la hausse des frais de personnel ainsi que des prix des matériaux et de l’énergie. Les réserves du Domaine des EPF, dont le Conseil fédéral demande la réduction, sont en diminution constante. D’ici à fin 2024, elles auront baissé de plus de 30%. Les réserves ne suffiront pas à compenser les coupes budgétaires décidées par la Confédération ni la faible croissance prévue dans le Message FRI. Le Conseil des EPF vous prie par conséquent de bien vouloir supprimer ce passage.
Le Conseil des EPF souhaite en outre préciser que la majeure partie (env. 95%) de la contribution financière annuelle de la Confédération est allouée aux six institutions du Domaine des EPF comme budget de base afin qu’elles puissent remplir leur mandat de base. Seuls 3 à 5% des contributions fédérales sont octroyés par le Conseil des EPF à des financement incitatifs et d’aide au démarrage visant à cofinancer des initiatives conjointes et de grandes infrastructures de recherche. La marge de manœuvre opérationnelle est donc très limitée, y compris au sein des institutions, qui doivent notamment faire face à la croissance des effectifs étudiants et au renchérissement, en particulier au niveau des frais de personnel, d’énergie et de construction.
Intelligence artificielle: nécessité de lancer une initiative à l’échelle nationale
L’intelligence artificielle (IA) a le potentiel de révolutionner l’humanité, tout comme l’a fait l’Internet. La Suisse dispose actuellement d’un positionnement exceptionnel en matière d’IA grâce aux investissements importants de ces dernières années, notamment au sein du Domaine des EPF. L’intelligence artificielle est une discipline phare au sein des deux EPF. Les quatre établissements de recherche utilisent et adaptent eux aussi fréquemment diverses méthodes basées sur l’IA.
Le Conseil des EPF est convaincu de la nécessité de regrouper les forces présentes dans le pays en matière d’intelligence artificielle et de mettre à disposition les infrastructures nécessaires aux activités de recherche, d’enseignement ainsi que de transfert de savoir et de technologie, ce qui devrait permettre à la Suisse d’accroître sa compétitivité et de devenir une nation de premier plan dans ce domaine. L’industrie, la société et le secteur public ne doivent pas devenir dépendants d’infrastructures dont les propriétaires ne partagent pas les valeurs de la Suisse. Dans ce contexte, le Domaine des EPF entend mettre l’accent sur une IA fiable et responsable, sur la formation d’un nombre suffisant de spécialistes, sur l’encouragement des start-up de ce secteur et sur la préparation de la société aux défis et opportunités de l’IA.
Le Conseil des EPF propose au Conseil fédéral d’élaborer un message spécial consacré à l’IA et de prévoir les ressources nécessaires afin que les acteurs du paysage suisse des hautes écoles et de la recherche puissent entreprendre sans plus attendre les travaux indispensables à ce sujet en collaboration avec l’économie et la société. Le Domaine des EPF est disposé et prêt à contribuer activement à une telle initiative de grande envergure, qui permettra à la Suisse de se positionner à l’échelle internationale en matière d’IA.
1 «Pour ce faire» se réfère ici à la phrase précédente: La compétence de fixer des priorités et des postériorités relève du Conseil des EPF et constitue une tâche essentielle de ce dernier.
